Définition : Il s’agit d’une maladie métabolique très fréquente (1/2500 naissances). Héréditaire et familiale, elle est grave, transmise sur le mode récessif autosomique. C’est un déficit génique qui entraîne la production de sécrétions en abondance, au niveau de toutes les glandes endocrines.
Diagnostic Celui-ci est généralement posé au cours des deux premières années de la vie. L'age moyen du diagnostic est de 7 mois. Il repose sur la mise en évidence de troubles respiratoires et d’une diarrhée chronique. Le test de la sueur permet le diagnostic (expliqué plus loin).
Epidémiologie : Dans le monde 1 personne atteinte naît chaque jour.
Les frères et sœurs des enfants malades sont, dans 2 cas sur 3, porteurs du gène et peuvent donc avoir eux-mêmes un enfant malade s'ils épousent un conjoint porteur lui aussi du gène.
Un couple ayant déjà un enfant atteint a 1 risque sur 4 d'en avoir un second atteint.
1 personne sur 25 est porteuse du gène.
Un diagnostic précoce améliore le pronostic du patient.
10% des malades ont des antécédents familiaux et les mariages consanguins sont fortement déconseillés.
Atteinte aussi bien filles que garçons.
L'espérance de vie se situe entre 25 et 30 ans.
Pathogénie : Le gène a été identifié en 1989. Il est localisé sur le bras long du chromosome 7.
C’est une maladie « multi-organes »: le fonctionnement de tous les organes qui sécrètent du mucus (notamment muqueuses respiratoires et digestives) vont progressivement se bloquer dans leur fonctionnement.
La composition du mucus devient de plus anormale.
Au niveau pulmonaire, le mucus en grande quantité provoque une colonisation bactérienne.
Au niveau digestif, on retrouve des carences en protéines, lipides, provoquant une dénutrition.
La maladie touche principalement l'appareil respiratoire, le tube digestif et ses annexes (pancréas, foie et voies biliaires), également les sécrétions de sueur et l’appareil génital.
Physiopathologie : Le mécanisme de la maladie n'est pas encore parfaitement connu. On sait qu'il existe des anomalies de fonctionnement des transports ioniques avec imperméabilité relative aux ions chlore et une augmentation de la réabsorption d'ions sodium.
Dépistage anténatal : Les couples ayant un enfant atteint doivent être informés de la possibilité de ce diagnostic, par l’étude des produits de biopsie du trophoblaste (villosités choriales du placenta) dans la 10° semaine de grossesse. Le dépistage peut être également indiqué chez les couples dont un membre de la famille est atteint.
D’autres méthodes sont également utilisées dans le but de dépistage, comme la ponction de liquide amniotique à la 18ème semaine d’aménorrhée.
Si l'enfant est atteint, une interruption médicale de grossesse peut être envisagée.
Diagnostic néonatal : Il se fait par dosage de l'albumine dans le méconium (BM-test
). L'absence de sécrétion de trypsine par le pancréas du fœtus l'empêche de digérer le liquide amniotique qu'il avale in utero. La présence d'albumine dans le méconium des enfants naissant avec une mucoviscidose est liée à cette insuffisance pancréatique.
Le diagnostic est possible au 5° jour de vie par le dosage de la trypsine dans le sang. On prélève le sang au talon sur papier buvard.
Dans 10% des cas, le diagnostic est fait à cette période de la vie devant une occlusion néonatale (iléus méconial néonatal) due à l'obstruction de l'intestin par un bouchon de méconium épais, adhérent et blanc.
Symptômes : En l'absence de manifestations néonatales, c'est au cours des premiers mois de la vie que le diagnostic se pose (94% des cas diagnostiqués avant 2 ans).
Il y a présence de :
- diarrhée chronique (du fait de l'absence d'activité du suc pancréatique (trypsine, lipase, amylase...)), entrecoupée d'épisodes de déshydratation, qui retentit sur la croissance de l'enfant.
- selles volumineuses, abondantes, grasses (stéatorrhée) et d'odeur fétide.
- viscosité des sécrétions pulmonaires qui entraîne des troubles respiratoires.
- infections pulmonaires à répétition avec toux, spontanée, grasse et productive, incessante, épuisante, gênant l'alimentation et le sommeil. Infections récidivantes des voies aériennes supérieures et ORL.
- respiration rapide remarquée par les parents : rythme respiratoire de 40 à 50/mn.
- dyspnée au cours des repas et à l'effort, avec cyanose, hippocratisme digital (ongles élargis et recourbés en griffe), et déformation thoracique parfois.
- râles crépitants, secs, sans hyperthermie.
Examens complémentaires : Radiographie pulmonaire : met en évidence des images d'emphysème et d’atélectasie.
Test à la sueur : La teneur en ions Na+, K+ et Cl- des sécrétions des glandes sudoripares est augmentée. On dose uniquement le chlore qui, lorsqu'il est supérieur à 80-100 mEq/l permet de porter le diagnostic. Deux tests positifs sur sueur recueillie par ionophorèse, sont nécessaires pour affirmer le diagnostic.
Etude des selles : apprécie la stéatorrhée et montre l'absence de trypsine
Echographie pancréatique : permet de suivre l'évolution.
Evaluation de la fonction du foie : dosage sanguins des transaminases, gamma-GT, phosphatases alcalines ; échographie et scintigraphie du foie, ponction-biopsie hépatique.
Epreuves fonctionnelles respiratoires (EFR) et gazométrie : permettent de suivre l'évolution respiratoire.
Surveillance glycémique : les anomalies (tolérance au glucose) sont fréquentes.
Score de Schwachman : prend en compte des paramètres fonctionnels, respiratoires, nutritionnels et radiologiques.
Evolution : La mucoviscidose est une affection chronique.
La diarrhée est l'élément prédominant les premiers mois de la vie. Les complications pulmonaires vont ensuite dominer : la maladie évolue vers l'insuffisance respiratoire chronique et le cœur pulmonaire chronique.
On peut retrouver :
une cirrhose du foie avec hypertension portale,
des œdèmes,
un syndrome hémorragique,
une ostéoporose,
un diabète,
un prolapsus rectal,
un retard pubertaire
une stérilité chez les garçons et une hypofertilité chez la fille.
Pronostic : Il existe une très grande variation d'évolutivité d'un patient à l'autre, et même pour un même patient au niveau des différents organes ou appareils concernés.
Le pronostic individuel est par conséquent très difficile. Différents critères ont une certaine valeur pronostique:
Mauvais pronostic: sexe féminin, dénutrition, infection chronique à Pseudomonas, VEMS abaissé.
Bon pronostic: diagnostic précoce, suivi en centre spécialisé.
L'appréciation de l'état des patients se fait par des scores cliniques (Schwachman) et radiologiques (Brasfield), par le VEMS et la gazométrie. Les progrès du traitement ont entraîné une amélioration nette de la survie.
Traitement : Il doit s'efforcer de permettre une vie sociale et familiale aussi normale que possible. Il est précoce, intensif et permanent : kinésithérapie respiratoire, antibiothérapie, prise en charge diététique.
Il repose sur les techniques de drainage bronchique et le traitement anti-infectieux. (Les infections broncho-pulmonaires sont constantes et conditionnent le pronostic vital).
Kinésithérapie respiratoire est un élément essentiel de la prophylaxie et du traitement des complications respiratoires.
Education sur la toux et l'expectoration
Gymnastique respiratoire
Toilette bronchique biquotidienne pratiquée par les parents plusieurs fois par jour : drainage de posture, pieds surélevés et tête en bas tournée sur le côté (pour bien vider les poumons)
Broncho-aspirations
Aérosols de produits fluidifiants les sécrétions bronchiques ou d’antibiotiques pratiqués après chaque repas
Vaccinations (coqueluche, diphtérie, tétanos, poliomyélite, rougeole, grippe, tuberculose, pneumocoque...)
Antibiothérapie dès que nécessaire
Examen cyto-bactériologique des crachats avec antibiogramme effectué régulièrement
Encourager la pratique précoce et régulière d'un sport même à haut niveau (vélo, jogging, tennis etc).
Chirurgie pulmonaire d'exérèse : place de plus en plus importante
Régime alimentaire adapté : aliments qui ne nécessitent pas l'intégrité de la fonction du pancréas exocrine. Régime hypercalorique, pauvre en lipides, riche en protides, enrichi en vitamines liposolubles et en fer.
Dans certains cas, assistance nutritionnelle : alimentation entérale nocturne à la sonde, alimentation parentérale discontinue (perfusions) ou nutrition parentérale exclusive.
A venir : - Transplantations pulmonaire et cardio-pulmonaire.
Huit centres de transplantation pratiquent les greffes pulmonaires dans la mucoviscidose (Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Nantes...). Une trentaine de greffes sont effectuées chaque année.
- Clonage du gène : de nouvelles voies de recherche se sont ouvertes. La thérapie génique va tenter de corriger in vivo le défaut génétique du plus grand nombre de cellules bronchiques. Plusieurs études sont en cours et ouvrent un espoir énorme face à cette redoutable affection.
- Des recherches restent en cours dans les domaines suivants :
à anti-inflammatoires et anti-protéases
à inducteurs du canal chlore que pourraient être les dérivés de l'ATP
à médicaments pouvant moduler la pharmacologie de la protéine CFTR