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| Sujet: l'hémophilie Mer 7 Oct 2009 - 16:53 | |
| C'est une maladie hémorragique héréditaire à transmission récessive liée au sexe. Il en existe deux variétés, soit un déficit en facteur VIII, soit un déficit en facteur IX. Les possibilités thérapeutiques substitutives actuelles leur laissent espérer une vie subnormale. 1 Incidence de l'hémophilie
L'incidence est de l'ordre de 1/5 000 garçons. En France, il y aurait 4 à 5000 hémophiles, 40 à 50 naissent chaque année. Elle se répartit ainsi : hémophilie A (déficit en VIII) = 80 % et hémophilie B (déficit en IX) = 20%. 2 Hérédité de l'hémophilie
C'est une maladie à transmission récessive liée au chromosome X. En dehors des cas de mutations -toujours possibles- ces enfants naissent le plus souvent d'un homme normal (XY) avec une femme conductrice (Xh X). Cette figure illustre la transmission :
| soit :
- 25% de femmes conductrices
- 25% de femmes normales
- 25% de garçons hémophiles
- 25% de garçons normaux
| Remarques : - dans les 3/4 des cas, on retrouve des antécédents familiaux, - il existe deux types de conductrices :
- les conductrices obligatoires sont "les filles d'un hémophile, les soeurs d'hémophiles qui ont un fils hémophile, les mères des deux ou plus de deux enfants hémophiles patents"
- les conductrices possibles sont "les filles d'une conductrice obligatoire ou les soeurs d'un hémophile". Le risque génétique entre les deux est différent.
- les associations d'hémophiles paraissent favoriser la survenue de véritables hémophilies féminines (nées de père hémophile et d'une mère vectrice). 3 Manifestations de l'hémophilie
3.1 Clinique
La symptomatologie est identique dans les deux formes ; elle dépend de la sévérité du déficit. 3.1.1 Circonstances de découverte
1- parfois lors d'un examen systématique dans le cadre d'une enquête familiale ou avant une intervention chirurgicale. 2 - le plus souvent, il s'agit de manifestations hémorragiques :
- rares en période néonatale (risque d'hémorragie cérébrale).
- parfois avant 1 an. ; le diagnostic est évoqué lors d'une circoncision rituelle très hémorragique, un volumineux céphalhématome, des hématomes récidivants ou au point d'injection des vaccinations, une plaie hémorragique.
- elles apparaissent surtout au moment de la marche où les hématomes et les hémarthroses deviennent de plus en plus fréquents++.
3.1.2 Les manifestations hémorragiques de la forme typique
Les saignements sont surtout profonds, articulaires et musculaires. 3.1.2.1 Les hémarthroses
3.1.2.1.1 hémarthroses aiguës
La première hémarthrose survient souvent après un traumatisme minime mais ultérieurement, elles surviennent spontanément, au moins en apparence. Les genoux, les coudes et les chevilles sont les plus souvent touchés. L'hémarthrose constituée se traduit par : - la douleur : vive, permanente, exacerbée par la mobilisation et par la palpation. Elle est calmée en quelques heures par la perfusion de fraction anti-hémophilique à dose suffisante. - le gonflement articulaire est visible et doit être mesuré au mètre ruban en prenant soigneusement les repères, - l'augmentation de la chaleur locale, - la limitation des mouvements est liée à l'épanchement intraarticulaire. Le flexum doit être mesuré au rapporteur pour suivre l'évolution. 3.1.2.1.2 arthropathie chronique
Elle est fréquente et secondaire à la récidive des hémorragies intra-articulaires. Elle se traduit par une limitation et une déformation de l'articulation ainsi que par une diminution de la force musculaire. C'est une complication très invalidante à long terme. Le traitement précoce des hémarthroses réduit ce risque. 3.1.2.2 Les hématomes
Un traumatisme est habituel ; la douleur est généralement le signe révélateur : on essaie d'apprécier la tuméfaction et l'état de tension. 3.1.2.2.1 Les hématomes intramusculaires
Leur gravité tient à l'importance de la gaine du muscle. Ainsi les hémorragies dans les muscles à grande gaine (cuisse, fessier, abdominaux superficiels) peuvent entraîner des anémies graves chez le petit enfant. Dans les muscles à petite gaine (face antérieure de l'avant-bras, paume de la main et mollet), les hémorragies entraînent des compressions vasculo-nerveuses (syndrome de Volkman). L'hématome de psoas est fréquent et le diagnostic difficile avant la phase d'état. Au début, il s'agit d'une douleur modérée au niveau du pli inguinal avec une flexion de la hanche en rotation interne. L'extension est impossible. Une échographie en urgence peut objectiver l'hématome. La complication à redouter est la compression du nerf crural. Les hématomes rétropéritonéaux sont rares, de diagnostic difficile avec une douleur abdominale mal définie. Une échographie ou un scanner peuvent montrer l'hématome. 3.1.2.2.2 Manifestations hémorragiques diverses
Elles sont fréquentes. Les hématomes du plancher de la bouche ou du cou peuvent entraîner une asphyxie ; hématurie, hémorragie digestive, peau, langue,... 3.1.2.3 Les autres manifestations hémorragiques graves
Elles sont moins fréquentes et souvent post-traumatiques. Elles concernent les viscères profonds et les hémorragies intra-cérébrales. Ces dernières doivent être évoquées après un traumatisme même minime++. 3.1.3 Dans les formes atténuées
Les hémorragies sont minimes ou absentes. 3.2 Biologie
Les facteurs VIII et IX interviennent dans l'élaboration de la prothrombinase par la vie endogène. Le diagnostic est essentiellement biologique et repose sur des tests simples : - éléments négatifs : numération des plaquettes, temps de saignement et temps de Quick sont normaux - éléments positifs :
- allongement du temps de céphaline-Kaolin qui est souvent double ou triple du témoin.
- l'activité des facteurs coagulants VIII ou IX est effondrée.
Ce dosage permet de définir la sévérité :
- taux de facteur < 1% H. majeure
- taux de facteur 1 à 5 % H. modérée
- taux de facteur 5 à 25 % H. atténuée
- taux de facteur 25 à 50 % H. frustre.
4 Diagnostic différentiel
On discute le diagnostic avec TQ normal et TCK allongé. 4.1 Maladie de Willebrand
- transmission autosomique dominante - manifestations moins sévères que dans l'hémophilie - diagnostic :
- TS allongé,
- plaquettes normales,
- TCK allongé,
- VIII antigène ou cofacteur de la ristocétine : diminué.
4.2 Anticoagulants anti-facteurs VIII ou anti IX
Surtout au cours des maladies de système (ex. le lupus) ou après des perfusions de facteurs anti-hémophiliaires. Ils se caractérisent par un allongement du TCK. 4.3 Déficit en facteur XI
Exceptionnel. 5 Traitement
5.1 Traitement préventif
5.1.1 Etablir une carte d'affiliation
A l'association des hémophiles où seront consignés toutes les transfusions de produits sanguins et les incidents. 5.1.2 Etablir des règles de conduite :
- toutes les vaccinations sont possibles. Le vaccin contre l'hépatite B est recommandé très précocement, - interdire des intramusculaires, - se méfier des médicaments ayant une action sur l'hémostase : aspirine, anti-inflammatoire, - bien comprimer après une ponction veineuse, - bonne hygiène dentaire. 5.1.3 Enquête familiale
Pour dépister d'autres hémophiles et les conductrices. 5.1.4 Aborder la possibilité du diagnostic anténatal
Lors du conseil génétique. 5.2 Traitement curatif
Avant toute investigation éventuelle, il faut perfuser du concentré anti-hémophilique le plus rapidement possible et s'assurer de l'absence d'inhibiteurs. 5.2.1 Produits actuellement utilisés (mars 1991)
5.2.1.1 En l'absence d'anticoagulants
- concentré de facteur VIII très haute pureté. En théorie, la perfusion d'1 UI/kg de poids augmente le taux circulant de 2 %, - concentré de facteur IX très haute pureté. Une UI/kg augmente le taux sanguin de 1% en moyenne. Le nombre d'unités est indiqué sur l'étiquette. La vitesse de perfusion est environ de 2 ml par minute. 5.2.1.2 En présence d'un anticoagulant
- concentrés prothrombiniques activés : Autoplex, F.E.I.B.A. - concentrés prothrombiniques partiellement activés : C.P.P.A, facteur VII activé (ACSET). - fractions d'origine porcine : HYATE C (VIII porcins à conserver à -20°C). 5.2.2 Principes généraux de traitement
5.2.2.1 En cas de saignement peu important :
Comprimer pendant 10 minutes avec thrombase au mèchage d'une narine avec une mèche résorbable. 5.2.2.2 En cas de saignement plus important :
Perfusion de facteurs à la posologie moyenne de 20U/kg en absence d'anticoagulants qui peut être renouvelée au bout de 12 heures selon la gravité. 5.2.3 Cas particuliers 5.2.3.1 Hémarthroses
- Hémarthroses avant l'apparition de signes cliniques objectifs : 10 à 20 U/kg (souvent par l'hémophile lui-même), -Hémarthroses constituées : 20 U/kg. Immobilisation 24 à 48 heures. - Hémarthroses récidivantes : traitement prophylactique : 20 U/kg tous les deux jours pour le facteur VIII et tous les trois jours pour le facteur IX durant 1 à 3 mois. A côté du traitement substitutif, une synoviorthèse pourra être envisagée. Le diagnostic différentiel se pose avec les fractures, les arthrites septiques et les lésions méniscales. 5.2.3.2 Les hématomes
- superficiels : simple compression, - profonds : perfuser immédiatement :
- perfusion : 30 U/Kg 3 fois par jour durant 3 jours puis 20 UI/kg 2 fois/j durant deux jours, 1 fois/j. jusqu'à la guérison. Immobilisation jusqu'à disparition des signes, électrothérapie et corticoïdes.
5.2.3.3 Traumatismes crâniens
Il est parfois difficile d'apprécier la gravité. - Traumatisme important : perfusion immédiate de 50 Ul/kg suivie de 25U/kg toutes les 8 à 12 heures, puis faire une scanner pour rechercher un hématome. La durée du traitement dépendra de l'existence ou non de lésions. - Traumatisme minime : 30 Ul/kg. Si la ponction lombaire est nécessaire, elle doit être précédée d'une perfusion de 30Ul/kg répétée 12 heures après. 5.2.3.4 Chirurgie
Toute chirurgie est possible mais en centre spécialisé pouvant assurer un support en facteurs et en suivi hématologique : maintenir un taux de 40 % au moment de l'intervention et la semaine suivante. 5.2.3.5 Autres hémorragies
5.2.3.6 En cas de présence d'un anticoagulant
On peut discuter soit :
- saturer l'anticoagulant
- utiliser des concentrés prothrombiques activés
La dose moyenne est de 100 Ul/kg pouvant être répétées 6 heures plus tard. Pour éviter les malaises, ne pas dépasser 2 ml/minute pour l'Autoplex et 2 U/kg minue pour le FEIBA. 5.2.4 Surveillance du traitement
Au cours d'un traitement prolongé, il faut surveiller avant une injection :
- TCK,
- dosage du VIII et du IX,
- rechercher un anticoagualant au début du traitement puis au bout de 8 à 15 jours. Des transfusions inefficaces font craindre l'apparition d'un anticoagulant.
5.2.5 Complications du traitement
5.2.5.1 Infectieuses :
- hépatites transfusionnelles (autres que l'hépatite B si correctement vacciné), - SIDA : ne doit plus se voir depuis 1985 avec le contrôle et la préparation des produits sanguins. 5.2.5.2 Immunologiques :
- hémolyses chez des sujets A, B ou A B recevant de fortes doses de concentrés contenant des Anti A ou des Anti B. Il faut dans ce cas préférer les concentrés isogroupes. - apparition d'un anticoagulant circulant dirigé contre le facteur manquant ++.
- le rechercher toutes les 5 à 10 perfusions pendant les 100 premières perfusions, ou après tout traitement prolongé ;
- fréquence de survenue : 6 %,
- au-delà de la 50è transfusion, le risque d'apparition est minime car il existe des faibles et des forts répondeurs ;
- l'existence d'un anticoagulant pose de difficiles problèmes thérapeutiques qui doivent être résolus en Centre Spécialisé. C'est l'une des indications de l'Autoplex.
6 Devenir
6.1 Evolution
- L'espérance de vie est pratiquement identique à celle du reste de la population depuis l'utilisation des traitements substitutifs. - Le problème est surtout fonctionnel, lié aux séquelles articulaires. Un problème difficile et onéreux est le traitement chirurgical d'un sujet ayant un inhibiteur. 6.2 Problèmes médico-sociaux
6.2.1 Si les conditions familiales le permettent
L'enfant et les parents sont éduqués. Le traitement se fait à domicile. Ils disposent à la maison de produits anti-hémophiliques. 6.2.2 Si les conditions familiales ne le permettent pas
L'enfant peut être pris en charge dans des centres spécialisés permettant aussi une scolarité. 7 Diagnostic anténatal
Le diagnostic anténatal est possible. Il ne se justifie bien entendu que dans les formes sévères et que si les familles ont décidé d'interrompre la grossesse en cas d'enfant atteint. Il est possible dans les formes familiales : - soit, jusqu'à un passé tout récent, par diagnostic de sexe chromosomique par amniocentèse à la 17è semaine et en cas de foetus mâle, dosage du facteur VIII (ou IX) par ponction du cordon sous échographie. - soit, tout récemment, par biopsie de trophoblaste qui permet, à 10 semaines, à la fois le caryotype foetal et, par biologie moléculaire, si la famille est informative, un diagnostic d'enfant indemne ou atteint. | |
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